L’émulation culturelle
« Quels conseils donneriez-vous aux jeunes entrepreneurs culturels ? »
Je ne suis qu’écrivain, donc pas conseilleur. Je ne suis qu’écrivain, donc solitaire par définition, mais n’ai rien contre le mot « entreprendre », qui est un mot fort et fin, productif. Je ne suis pas contre le sens même économique du mot, comment le serais-je, même si j’en vois qui tombent dans ce cliché bien fait pour leurs émois rhétoriques, comment être contre l’esprit d’entreprise quand on use soi-même des moyens de diffusion techniques qu’il renouvelle, tantôt en mieux tantôt en pire ? Ce qu’on appelle « entreprendre », à vrai dire, rejoint l’esprit d’initiative sans lequel il n’est pas de création, en aucun domaine. Nous-mêmes, « créateurs » solitaires à notre table, dans notre atelier ou notre studio multimédia, ne sommes-nous pas stimulés, mis en émulation par les œuvres des autres, aiguillonnés par leurs trouvailles qui ouvrent la voie aux nôtres ? L’atelier de Rembrandt et celui de Jackson Pollock étaient de lieux de débats, tensions, émulation où l’esprit d’initiative individuelle se nourrissait à la concurrence et au concours des autres.
Cela rappelé, nous savons en quelle époque nous sommes. Et celle-ci, comme les précédentes et les futures, trouve de nouvelles oppressions pour conjurer les libertés conquises. Je pense notamment à ce que j’ai nommé le « vulgarisme », c’est-à-dire la vulgarité cultivée de la vie intellectuelle, artistique, littéraire - culturelle, en un mot qui est à juste titre votre terme générique. La culture se retourne contre la culture, tel est l’essence de cette époque. Et la France est à cet égard lourdement pionnière puisqu’elle hérite d’un ancestral magistère d’opinion intellectuelle, depuis les philosophes des Lumières jusqu’aux écrivains (le plus souvent sinistrement « engagés »), et qu’en conséquence elle est le pays au monde qui a le plus médiatisé les auteurs et qui leur a donné le plus de pouvoir établi, à coefficient narcissique qui plus est. De là, la presse et l’édition ont suivi la nappe, qui tire, tombe vers le bas. Elles n’étaient et n’y sont toujours pas obligées. Mais elles soutiennent et diffusent, résultat : les auteurs les plus connus sont désormais les plus obscurantistes, et l’erreur n’y est plus seulement humaine, elle fait de l’effet. Là contre il y a à entreprendre, comme les créateurs des Lumières créèrent leurs entreprises de liberté face aux savoirs obscurantistes dominants.
Donc, toute époque ayant à créer ses nouveaux espaces de liberté qualitative, civilisatrice, être entrepreneur culturel aujourd’hui c’est cela : faire le travail qualitatif que ne font plus les structures dominantes. L’édition à cet égard en a grand besoin, comme les arts plastiques, les médias, tout comme le cinéma y parvient dans ses interstices.
D’abord connu pour son Robespierre, derniers temps (1984) où la littérature sert d’intuition complémentaire aux travaux des historiens spécialistes, il est avant tout romancier, auteur de deux cycles romanesques, « Le Cycle des ruses de la vie », et « La Vis et le Sablier » dans lequel il explore un nouveau genre romanesque, la « métaphysique-fiction ». Il est plus connu pour ses essais, du fait des polémiques qu’ils ont suscités, notamment son approche contestataire de ce qu’il a nommé « l’Art du Contemporain », dont il fait la Critique de la critique, en alliant analyse et description des attitudes que les théories révèlent.
En résulte, dans le fil d’une littérature moraliste façon Provinciales ou Caractères d’aujourd’hui, une Comédie de la critique qui campe à vif les milieux d’art et l’époque. C’est également le cas de sa critique de la critique littéraire française (notamment dans le Pari littéraire, paru en 1994 et logiquement passé sous silence par les critiques, puis reparu et augmenté dans Qui a peur de la littérature ? en 2002). Ces deux ensembles donnent une vue sur ce qu’il appelle la Situation des esprits (entretiens parus en 2006) dans la culture contemporaine. En savoir plus sur le blog : http://leblogdedomecq.blogspot.fr/
© A. Leotard
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