Les villes, à travers leur développement et leur évolution, constituent une matière infinie pour l’imaginaire des artistes. Rêvées en entités créatives ou en espaces territoriaux attractifs, elles permettent de mener des réflexions sur le futur de nos sociétés.
L’américain Chris Burden s’interroge sur le devenir de grandes villes comme Los Angeles. L’artiste, connu pour ses performances plus ou moins consensuelles – dans « Shoot » (1971), il demandait à un ami de lui tirer une balle dans le bras -, a commencé à réaliser des installations usant de nombreuses technologies automobiles à partir de 1975.
18 pistes, 40 grattes ciel, 1200 voitures et 13 trains miniatures allant jusqu’à 386km/h et équipées d’un aimant pour tenir à la route, des ponts, des tunnels et des viaducs, voilà « Metropolis II », maquette gigantesque de 55m2 et ludique qu’a imaginé ce physicien spécialiste d’architecture et d’arts visuels.
Ce circuit, amplification d’une œuvre précédente intitulée « Metropolis I », est encore plus colossal, démesuré, étourdissant. Long de neuf mètres et haut de trois, construit à partir de jouets, qui sont, pour l’artiste, « le reflet de la société » (1), ce prototype de la métropole de demain a nécessité quatre années de travail à une équipe de 12 personnes.
A la fois métallique et coloré, enfantin et hypnotisant, sensiblement élaboré et composé, l’ensemble évoque les flux de la cité du futur, un espace urbain dominé par la circulation d’un nombre démesuré de véhicules. Environ 100 000 voitures circuleront chaque heure à travers la ville, d’après des estimations prospectives. Elles symboliseront l’accélération perpétuelle et frénétique du temps. Ainsi, « le bruit et le flot continu de trains, la vitesse des petites voitures, l’intensité constatée, suscitent chez le visiteur le stress d’une ville dynamique, active et animée du XXIème siècle dominée par la voiture » (2) explique Chris Burden. Mais au delà de cette matérialisation du territoire urbain de demain, il s’agit également de s’intéresser à la fin d’un cycle, celui de la voiture librement conduite – et de la minimisation des dangers induits par des conducteurs parfois insouciants -, car pour l’artiste « bientôt, on tapera une adresse et on n’aura rien à dire sur la façon dont on s’y fera conduire à travers les courbes » (3).
L’allusion au célèbre film « Metropolis » de Fritz Lang, réalisé en 1927, est évidente, excepté que le réalisateur allemand évoquait un univers carcéral de centaines d’ouvriers robots. Néanmoins, là où Lang s’érigeait en contestataire de la dichotomie sociale, Chris Burden n’oppose pas de jugement de valeur. Pour lui, « Métropolis II » ne cherche qu’à recréer l’énergie qui se dégagerait d’une telle métropole. Le bruit émis par les voitures dans l’œuvre est d’ailleurs dores et déjà « la constante (…), et quand on est dedans, on l’accepte, tout simplement » (4), mais est en voie de devenir encore plus assourdissant. Libre à chacun de décider si une telle (r)évolution urbaine est à craindre ou à espérer.
L’installation se trouve au LACMA (Los Angeles County Museum of Art) depuis l’automne 2011. Un court documentaire sur l’œuvre, réalisé par Henry Joost et Ariel Schulman, est également disponible sur le blog du LACMA, « Unframed » (5).
(1) « How Chris Burden Created Metropolis II » par John Pavlus, sur le site fastcodesign.com
(2) Article « Best hot wheels track ever : Artist creates massive circuit featuring 1,000 cars going 230 mph », par Louise Boyle, Mail Online, 10 janvier 2012
(3) « How Chris Burden Created Metropolis II » par John Pavlus, sur le site fastcodesign.com
(4) « Chris Burden’s Metropolis », par Catlin Moore sur le site artlog.com, 9 février 2012
(5) http://lacma.wordpress.com/2012/01/10/metropolis-ii/
Une contribution de Sciences Po Paris, par Margaux Juvénal.
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