Le site de Paulilles, patrimoine catalan français, autrefois occupé par l’usine de dynamite Nobel, est aujourd’hui un havre de paix où se mêlent détente sur la plage, restauration du patrimoine maritime, et expositions diverses.
Mercredi 8 août 2012, 15h30, plage de Paulilles : des enfants jouent bruyamment au bord de l’eau, des familles nombreuses tentent de trouver une place pour étaler leurs serviettes, un grand-père apprend à nager à sa petite-fille, trois adolescentes dorent tranquillement au soleil. Un siècle auparavant ce spectacle serait passé pour totalement incongru : non pas que le concept de vacances fut encore inexistant, mais parce que le site de Paulilles était alors davantage connu pour sa dynamiterie Nobel que pour ses beaux paysages.
C’est en 1870 que l’Etat français décide d’implanter sur la côte Vermeille, entre Port-Vendres et Banyuls, une usine d’explosifs, protégée à priori par son éloignement de l’ennemi prussien. Au départ exclusivement dédiée à l’armement, sa production est rapidement commercialisée à des fins privées dans l’industrie et le bâtiment. En 1975, l’usine fabrique près de 4000 tonnes d’explosifs par an. Au plus fort de son activité elle emploiera entre 300 et 400 ouvriers, tous logés sur place. Paulilles devient un village quasiment autonome grâce à l’implantation d’une école, d’une église et même d’un potager.
A la fin des années 70, Paulilles subit la crise du marché des explosifs et, malgré la diversification dans le plaquage de métaux, sa production diminue chaque année. En 1984, la Société Nationale des Poudres et Explosifs (SNPE), propriétaire de l’usine, ferme définitivement le site.
Craignant bien avant sa fermeture que ce grand espace ne soit bétonné par des projets immobiliers, les acteurs locaux ont veillé à son classement dès 1979. Et effectivement, cela permit de décourager le grand promoteur Jean-Claude Méry, premier acheteur de Paulilles, bien décidé à transformer l’anse en une gigantesque marina de luxe. C’est donc seulement en 1998 que le Conservatoire du littoral peut acheter le site de Paulilles pour tenter de le préserver définitivement.
En 2000, le Conservatoire confie la gestion du site au Conseil Général des Pyrénées Orientales. Quelques années s’écoulent avant que le projet définitif de réhabilitation ne soit mis en place : « Paulilles, l’avenir d’une mémoire », regroupant une équipe pluridisciplinaire de botanistes, architectes, paysagistes, ainsi que la participation des associations de préservation du patrimoine local.
Il faudra 17 mois pour que le site de l’ancienne usine ne soit sécurisé, dépollué et réaménagé (du moins pour 17 ha sur les 32,5 au total). Le budget du projet s’éleve à 12 millions d’euros, financé en partie par la Région Languedoc-Roussillon, l’État et l’Europe. L’anse de Paulilles ouvre enfin ses portes en 2008.
Le site de Paulilles regroupe notamment aujourd’hui :
Ce grand ensemble, mis en place dans les anciens bâtiments de l’usine, peut être considéré comme un écomusée particulièrement exhaustif sur la vie socio-culturelle de ses anciens habitants, mais aussi comme un exemple innovant de site éco-responsable puisque son espace est entièrement sans poubelle et piétonnier.
On peut considérer cette réhabilitation de friche industrielle comme un grand succès pour la région des Pyrénées-Orientales, notamment en matière de tourisme, puisque le site de Paulilles accueillait 240 000 visiteurs en 2011 [1].
Mais elle est surtout la démonstration d’une volonté politique parfois rare en matière d’offre culturelle. En ne se prêtant pas au jeu des transactions immobilières et en créant ainsi le site de Paulilles, gratuit et accessible au plus grand nombre, les acteurs politiques locaux (et européens) ont fait un choix qui pouvait paraître osé : un pari sur la culture.
En effet, dans une région où le taux de chômage avoisine les 14,2% [2] , ils ont su refuser un projet qui prétendait créer des centaines d’emplois mais qui aurait détruit à tout jamais la mémoire du lieu et son paysage.
De plus, le projet de Paulilles a permis d’amener une certaine offre culturelle dans un lieu habituellement exclusivement réservé aux loisirs de vacances : la plage.
Une contribution de l’université d’Avignon, par Cécile Bataille
Pour aller plus loin :
[2] Source Insee, taux de chômage localisés.
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